Interview Grant Morisson
Sam 18 Mar 2017 - 16:58
Merci BUZZCOMICS
http://www.buzzcomics.net/showthread.php?t=57028
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Tiré du regreté site Heroes merci à Alex qui l'avait en archive :
INTERVIEW AVEC GRANT MORRISON
C’est à Bristol, au cours du Festival COMICS 99, que j’ai retrouvé Grant MORRISON, un scénariste que j’avais déjà eu le grand honneur d’interviewer quand il était venu à Paris en 1990 (ma première interview, comme le temps passe !(1) ). A l’époque, il avait écrit ANIMAL MAN, DOOM PATROL, ZENITH, et ARKHAM ASYLUM, des oeuvres qui lui avaient déjà assuré une certaine popularité. Neuf ans plus tard, ce scénariste talentueux a encore accru sa réputation avec deux séries : JLA, qu’il a ramené à sa grandeur d’antan, et THE INVISIBLES, une série complètement déjantée. Au cours de cette interview qu’il a bien voulu nous accorder, il nous a parlé de ses travaux, et de ses expériences étrange avec la magie des comic books.
HEROES : La dernière fois que nous nous sommes rencontrés, vous écriviez ANIMAL MAN et DOOM PATROL, et j’aurais quelques questions supplémentaires à ce sujet. Tout d’abord, une question idiote : est-ce que le vrai modèle de Danny the Street dans DOOM PATROL a eu connaissance de son apparition dans la série ? (2)
Grant MORRISON : Je ne pense pas qu’il l’ait su. Personne ne m’a dit si c’était le cas.
HEROES : Dans les derniers épisodes d’ANIMAL MAN, vous avez essayé de faire votre propre version du processus de réaction envers la mort : la négation, le chagrin, la colère, et ainsi de suite. Pensez-vous avoir réussi ?
Grant MORRISON : Je ne sais pas si j’ai réussi. Je parlais d’une expérience personnelle à ce moment-là. Quelqu’un de proche était mort, et je voulais écrire à ce sujet, et j’ai utilisé la bande dessinée pour le faire. Et ça s’est enclenché dans d’autres centres d’intérêt, comme la réalité, et comment nous voyons notre vie, et qui la contrôle vraiment. Donc je ne voulais pas vraiment parler de la mort, c’était simplement quelque chose qui m’était arrivé, et je voulais en parler dans la B.D., et en même temps y réagir, à ma manière.
HEROES : Dans le dernier numéro de cette série, vous avez aussi détruit la continuité de deux autres séries. Avez-vous eu des commentaires négatifs à ce sujet ?
Grant MORRISON : Il y a eu des gens qui se sont plaints à ce sujet, mais on ne peut pas se souvenir de tout. On ne peut pas tout savoir, on en peut pas lire toutes ces séries, aussi j’ai pu dire qu’un personnage était vivant, ou qu’il était mort, et ça arrive parce que c’est un grand univers, et qu’il y a beaucoup de personnages dedans. Enfin, les gens qui n’aiment pas ce que je fais, je ne les écoute même pas (rire). Je crois qu’il y a eu quelques critiques, mais la plupart des gens ont aimé ce que j’ai fait sur ANIMAL MAN.
HEROES : Avez-vous aimé ce qui a été fait avec le personnage après ça,
Grant MORRISON : Non. Je pense qu’il aurait dû rester un super-héros, et j’aime bien la façon dont il est revenu avec son costume et sa veste. Je crois que les gens n’ont pas compris. Il était un super-héros qui portait un costume, et puis il est devenu un chaman new age.
HEROES : Parlons maintenant de DOOM PATROL. Vous avez vraiment secoué l’équipe avec vos révélations sur le Chef. Quel était votre plan ?
Grant MORRISON : Quand j’ai pris en main la série, je voulais en faire la B.D. la plus bizarre au monde, parce que dans les années soixante, c’est ce qu’elle était. C’était la série la plus étrange et la plus effrayante de chez DC Comics. Alors je me suis dit : « Qu’est-ce qu’on pourrait faire pour maintenant ? », non pas en revenant en arrière et en refaisant la même chose, mais si je voulais faire le comics le plus bizarre, le plus étrange, de quoi aurait-il l’air ? Alors j’ai commencé à faire des recherches sur le surréalisme, l’écriture automatique, la magie, et j’ai utilisé tout ça pour en faire le comics le plus étrange. Et c’est tout ce que je voulais faire. Alors j’y mettais toutes sortes d’influences bizarres, des choses trouvées dans des films, des livres, des pièces de théâtre, etc.
HEROES : Vous avez aussi essayé de faire des satires de deux sortes de comics dans DOOM PATROL : le Punisher, avec l’histoire du Beard Hunter, et la mode Image avec DOOM FORCE. Pensez-vous que vous avez réussi pour DOOM FORCE ?
Grant MORRISON : Oui, au point que certains lecteurs ont cru que c’était réel (rire). Mais non, DOOM FORCE n’était qu’une blague, un truc dont Tom Peyer et moi avions discuté un jour dans un bar, en nous disant : « Et si on faisait une B.D. dans le style de Rob Liefeld ? ». C’est un truc qui aurait dû rester une conversation de bar, et ça a été publié.
HEROES : Vous savez bien sûr qu’il y avait de nombreuses coïncidences entre la DOOM PATROL et les X-MEN. Et quelques années après que vous ayez fait du Chef un être diabolique, le professeur X est devenu Onslaught. Pensez-vous que ce soit encore une coïncidence, ou que les scénaristes vous aient lu ?
Grant MORRISON : Une partie est une coïncidence, et une autre partie, ce sont des gens qui prennent des idées à droite et à gauche. Si quelqu’un vient avec quelque chose de nouveau, tout les autres le lisent, et en retirent quelque chose. Vous voyez, en ce moment, la plupart des comics de super-héros sont comme JLA, parce que JLA a du succès. Le médium se nourrit de lui-même. Donc, ça ne me surprendrait pas qu’ils aient lu ce que j’ai fait, et aient pensé : « Ce type en fauteuil roulant est devenu mauvais, faisons la même chose au Professeur X ».
HEROES : Parlons maintenant de vos projets en indépendant : ST. SWITHIN’S DAY. Vous avez eu quelques problèmes avec un membre du parlement britannique à cause de ça. Pourriez-vous nous en parler ?
Grant MORRISON : C’était un parlementaire en Grande-Bretagne qui avait mis la main sur une copie, et il l’a amenée au Parlement, et il l’a montrée, en disant : « C’est scandaleux, cette bande dessinée parle d’un garçon qui veut assassiner Margaret Thatcher, on ne peut pas admettre ça, on ne doit pas vendre ça aux enfants. » Il y a eu un article dans la presse, et nous avons vendu plus de copies. Ça a été une promotion, et de la publicité pour moi. Mais j’aime ça. J’aime quand les B.D. entrent dans le monde réel, et que les gens commencent à en parler.
HEROES : Parlons maintenant de STEED &MRS. PEEL : Etiez-vous un fan de la série télé ?
Grant MORRISON : C’est pour ça que j’ai fait la série. Non, en fait, la raison pour laquelle j’ai fait la série, c’est qu’on ma donné beaucoup de vidéos gratuites (rires). Je voulais faire une recréation complète de ce que la série avait de meilleur.
HEROES : Parlons maintenant de vos histoires avec Batman. Avez-vous été content de la façon dont ARKHAM ASYLUM a été, ou n’a pas été, promu ?
Grant MORRISON : Je ne pense pas qu’il ait été vraiment promu. Ce sont les gens qui ont eu cette impression. Ils ont dit qu’il y avait eu beaucoup de publicité, alors que ce n’était pas le cas. Mais je ne peux pas me plaindre. Le livre s’est très bien vendu, même s’il n’y a pas eu de promotion. Moi et Dave McKean avons dû faire la publicité nous-même auprès des magazines, et nous avons réussi à rassembler assez d’intérêt pour le livre.
HEROES : Vous avez eu quelques problèmes avec DC sur ce livre et sur GOTHIC. Est-ce fréquent pour un scénariste de tomber sur ce genre de malentendu ?
Grant MORRISON : Oui, je crois. Ça arrive tout le temps. A l’époque, c’était même plus facile. A l’époque, c’ était beaucoup plus expérimental. Mais ces jours-ci, avec un marché si petit, les gens sont moins prêt à expérimenter, et sont plus autoritaires, et même un peu fascistes, en ce qui concerne les B.D., et ils censurent beaucoup plus. Donc, ça a toujours été là, mais on doit trouver un moyen de contourner cet obstacle et de faire le meilleur travail possible dans ces conditions, parce qu’on ne peut aller que jusqu'à un certain point.
HEROES : Revenons un peu à DOOM PATROL. Vous avez fait une série sur l’un des personnages que vous y aviez créé, FLEX MENTALLO. Qu’essayiez-vous de raconter dans cette histoire ?
Grant MORRISON : C’est une de mes histoires préférées. Ce que j’essayais de suggérer, c’est que les super-héros sont aussi réels que nous. J’avais pris une approche post-moderne, et je pensais que quand je serais mort, Superman et Batman seraient encore là, ce que j’avais déjà dit dans ANIMAL MAN. C’est un univers aussi réel que le notre, avec une histoire, et une continuité. Des gens continueront d’écrire des histories de Superman quand nous ne serons plus là, donc, il est réel. Et je me suis dit : Que se passerait-il si les super-héros voulaient sortir de la page et entrer dans notre monde ? Les super-héros parlent à travers nous pour qu’on les rendent plus réels, et qu’on les fasse exister. Tout le travail que je fais là le rend plus possible. J’essaye de faire exister un super-héros (rire).
HEROES : Pensez vous que ce serait une bonne ou une mauvaise chose si ils prenaient vie ?
Grant MORRISON : Ça dépendrait des goûts. C’est dans le monde de l’imagination. Ce serait effrayant, ce serait intéressant, ce serait merveilleux, ce serait magnifique, ce serait toutes ces choses que nous avons dans les comics. Vous savez, le projet du génome humain est pratiquement terminé. Il sera terminé en 2005, et on commencera à altérer la structure génétique. On parle de créer Superman dans les vingt prochaines années. Donc, nous faisons exister ce monde.
HEROES : Vous n’avez pas fait beaucoup de projets pour Marvel, mais l’un d’entre eux était particulièrement gratiné : SKRULL KILL KREW. Etiez-vous un fan des FANTASTIC FOUR quand vous étiez enfant ?
Grant MORRISON : Non, quand j’étais enfant, j’avais un peu peur de ce genre de choses. Mon oncle était un grand fan de la série, et j’en lisais quand je rendais visite à sa famille. Les séries Marvel me faisaient un peu peur, parce qu’elles étaient si impressionnantes. Je préférais les séries DC. Alors, je n’étais pas un grand fan des FANTASTIC FOUR, mais je les lisais, et j’aime bien les cent premiers épisodes de la série.
HEROES : Vous avez donc, pour SKRULL KILL KREW, pris une page de la série dans les années soixante, et vous en avez fait une série qui a surpris plusieurs personnes. Avez-vous eu des commentaires négatifs de la part de Marvel ou des fans ?
Grant MORRISON : Non, pas beaucoup. Les gens l’ont juste ignoré. Chris Claremont ne l’a pas du tout aimée. Il s’en est plaint sur Internet, en disant que c’était une série qui était presque raciste (rire). Mais je crois qu’il était le seul. La plupart des gens n’ont même pas lu le livre.
HEROES : Alex Ross a dû la lire, puisqu’ils apparaissent dans EARTH X.
Grant MORRISON : Oui, dans les pages de textes. Donc, ils sont toujours là, quelque part (rire).
HEROES : Parlons maintenant de vos projets les plus récents. Vous avez commencé votre retour chez DC avec AZTEK. Pensez-vous avoir atteint le potentiel de la série ?
Grant MORRISON : Non, mais AZTEK a été arrêté assez vite. De plus, AZTEK n’était qu’une manière pour nous de revenir dans le DC Universe. Moi et Mark Millar, nous voulions retravailler sur des super-héros. Donc, nous avons créé un personnage juste pour y revenir. Et ça a marché, parce que grâce à AZTEK, j’ai eu JLA, et Mark a eu ses propres projets. Mais vers la fin, je pensais que la série devenait vraiment bonne, et intéressante. Mais elle n’a pas eu sa chance, et je vais tuer à nouveau le personnage dans JLA.
HEROES : AZTEK parlait d’anciennes prophéties Mayas sur la fin du monde. Pensez-vous vraiment que ça pourrait arriver ?
Grant MORRISON : Je ne sais pas si ça va arriver ou pas, mais c’est une idée intéressante. Quand on voit ce qui arrive maintenant, c’est toujours une possibilité
HEROES : Verrons-nous une résolution à cette conspiration de la Fondation Q ?
Grant MORRISON : Il va y avoir une histoire dans JLA qui va en terminer avec ça. Aztek va faire face au dieu sombre qu’il a été entraîné pour combattre.
HEROES : Passons maintenant à JLA. Vous avez remis dans cette équipe les grands noms du début.
Grant MORRISON : Oui. La Justice League devrait être les meilleurs personnages de DC, les personnages les plus célèbres, c’est ce qui fait marcher la série. Et DC a dit : « Non, nous n’avons pas besoin de ces personnages ». Et j’ai insisté, et bien sûr, qui devrait être dans la Justice League à part eux ? Ce doit être Superman, Batman, Wonder Woman. Ça a marché. C’est comme ça que ça devait être, et c’est comme ça que nous l’avons fait.
HEROES : Ces grands personnages ont aussi des événements qui arrivent dans leurs propres séries. Avez-vous eu des problèmes avec la continuité de ces séries ?
Grant MORRISON : Et bien, je n’ai pas aimé des choses comme Superman devenant électrique. Je voulais faire une JLA classique. Malheureusement, j’avais un Superman électrique, une Wonder Woman morte, différent Flashs venant d’on ne sait où, des choses qui m’ont ennuyé parce qu’elles n’étaient pas si pures, et que j’aime faire la forme pure de ces personnages. Mais j’ai dû m’adapter, et faire ce que j’ai pu. Mais j’aurais aimé faire la série en dehors de la continuité.
HEROES : Vous avez fait deux changements de membres dans la série. Le premier, avec Green Arrow et Aztek, n’a pas très bien marché.
Grant MORRISON : Non, en fait, j’avais un plan à ce sujet. Je voulais amener ces personnages, jouer un peu avec eux, puis les retirer ensuite. Je n’avais pas l’intention de les faire rester. Personne ne s’en est plaint, c’était juste mon plan de les avoir pour quelques numéros.
HEROES : Vous aviez dit au début que vous aviez pris votre inspiration dans les Chevaliers de la Table Ronde, puis vous avez changé pour les Dieux de l’Olympe. C’est bien ça ?
Grant MORRISON : J’utilisais simplement des mythologies différentes. Ça a toujours été mon inspiration. La dernière histoire est basée sur la mythologie nordique, Ragnarok, la fin du monde, donc j’ai fait des recherches sur le sujet. Mais la plupart des histoires de la JLA ont un arrière-plan mythique, en quelque sorte. L’histoire « Rock of Ages » est une sorte de quête du Saint Graal.
HEROES : De tous les nouveaux personnages qui sont entrés dans la JLA, lequel est votre préféré ?
Grant MORRISON : Plastic Man, je crois. J’aime aussi Steel. Je ne sais pas pourquoi, mais je l’aime bien (rire). Mais Plastic Man est mon préféré parce qu’il peut plaisanter, il peut rendre drôles les événements.
HEROES : Quels sont vos plans pour la JLA, avant que vous n’en partiez ?
Grant MORRISON : Et bien, je viens juste de terminer avec cette histoire de la cinquième dimension, le combat des génies. Puis, je vais en venir à la dernière histoire en six épisodes, qui verra un nouvel Injustice Gang, créé par Lex Luthor, avec de nouveaux personnages, comme Prometheus, qui en fera partie, donc, ce sont les plus grands ennemis de la Justice League. Et en même temps, la fin du Monde, avec cette créature du monde des Anciens Dieux, dans l’œuvre de Jack Kirby, revient pour détruire l’univers. Ce sera une sorte de bataille ultime pour la JLA.
HEROES : Avez-vous une idée de ce que Mark Waid fera avec la série une fois que vous l’aurez quittée ?
Grant MORRISON : Aucune idée. On n’en a même pas encore parlé. Je suis sûr qu’il fera un bon boulot. Je ne sais pas dans quelle direction il l’entraînera.
HEROES : Vous écrivez aussi un graphic novel sur la JLA. Quelle en sera l’histoire ?
Grant MORRISON : Ça parle du Crime Syndicate, qui avant Crisis existait sur Terre-III, une sorte de version maléfique de la Justice League, avec Ultraman à la place de Superman, Superwoman à la place de Wonder Woman. C’est leur histoire, et l’histoire du plus grand échec de la Justice League, et de la raison pour laquelle ils doivent échouer. Ça parle de mauvais héros, et de ce que serait un monde qui ne marche que par le crime. La Justice League essaye de rétablir les choses dans ce monde, mais échouent parce qu’ils ne peuvent pas y arriver, et le Crime Syndicate essaye de détruire notre monde, mais n’y arrive pas parce qu’ils ne travaillent pas ensemble. Ça met en contraste le bien et le mal.
HEROES : Vous avez eu aussi l’occasion de réaliser un grand crossover chez DC avec DC ONE MILLION, qui, à mon avis, était un des meilleurs
Grant MORRISON : Merci (rire)
HEROES : Tout d’abord, pensez-vous qu’il y aura encore des êtres humains dans un futur lointain ?
Grant MORRISON : Je ne pense pas qu’il y aura encore des êtres humains d’ici une centaine d’années seulement (rire). Mais c’est le DC Universe, et nous pouvons faire tout ce que nous voulons. Je me suis dit que, comme DC avait toujours aimé les grands nombres, en ce qui concerne l’avenir, quel était le futur le plus éloigné auquel on pouvait penser ? Et l’idée du Million est venue parce que je pensais que, comme on avait eu des numéro zéro et des choses comme ça, des gens qui faisaient des comics promotionnels avec des n° 0, des n° ½, etc., qu’est-ce qu’on pouvait faire à l’opposé ? Et bien, un n° 1.000.000. Et comme ce numéro serait publié dans l’avenir, on s’est dit que l’on pourrait voir ce qui se passerait au 853° siècle. Ça a commencé avec l’idée du nombre, et on en est arrivé à une histoire futuriste.
HEROES : Quel a été l’histoire que vous avez préférée dans ce crossover, en dehors de celles que vous avez écrites vous-même ?
Grant MORRISON : Mark Schultz a fait de très grandes choses avec Superman, je crois. Il a créé beaucoup de concepts géniaux, et il comprenait parfaitement ce que je faisais. Aussi certaines des choses qu’on faites Dan Abnett et Andy Lanning. Et HITMAN était vraiment bon (rire).
HEROES : Parlons maintenant des INVISIBLES. Qu’est-ce qui vous a donné l’idée de cette B.D. très spéciale ?
Grant MORRISON : Celui-là, c’est une B.D. sur ma vie (rire), dramatisée. Avec toute l’inquiétude et l’intérêt dans cette fin de siècle, j’ai voulu en quelque sorte faire un reportage sur les six dernières années du siècle, mais en utilisant une histoire d’aventure pour les raconter. Il y a 40 % de fiction, et le reste est réel. C’est en quelque sorte un journal intime, et par coïncidence, des choses bizarres me sont arrivées alors que je l’écrivais. Je le vois comme une sorte d’œuvre magique.
HEROES : Qui est votre personnage préféré dans la série ?
Grant MORRISON : Oh, j’essaye d’éviter cette question. J’ai simplement pris ma personnalité, et j’en ai mis des morceaux dans mes personnages. C’est une histoire sur moi, et je n’en préfère aucun.
HEROES : Que va-t-il arriver dans THE INVISIBLES maintenant, avant l’an 2000 ?
Grant MORRISON : En ce moment, l’histoire mène à la grande confrontation avec le coté obscur, et les derniers numéros révèlent les secrets de l’univers (rire). Avant de commencer THE INVISIBLES, j’étais à Katmandou, en voyage, et j’ai eu ce qui a semblé être une expérience d’enlèvement par des extra-terrestres. C’était très convainquant. Je n’y crois pas, mais quelque chose est arrivé, et j’ai eu ces informations, et c’est de ça que parle la série, et que j’ai essayé de faire passer en fiction. J’ai une explication pour l’univers, je peux expliquer des choses, on m’a donné des aperçus bizarres, et je ne sais pas si c’était vrai ou pas, mais je préfère écrire une B.D. là-dessus que de devenir un gourou et d’en parler à tout le monde dans la rue.
HEROES : Vous avez parlé de coïncidences bizarres entre THE INVISIBLES et votre vie. Pourriez-vous nous en parler ?
Grant MORRISON : D’accord. Ma première intention était d’en faire une œuvre magique. Je me basais sur les peintres des cavernes, qui peignaient des bisons sur les parois, et lançaient des bâtons dessus dans l’espoir de tuer ce gibier à la chasse. Il croyaient que les dessins faisaient se passer des choses. Alors j’ai amené cette idée un peu plus loin, et j’ai pensé : Pourquoi pas une B.D. entière qui serait un sort magique pour transformer le monde ? Alors j’ai commencé à faire ce genre de choses, et je ne savais pas dans quoi je mettais les pieds. J’ai pris un des personnages qui étaient basés sur moi, King Mob, et je l’ai mis dans une situation dans laquelle son visage était dévoré par un insecte. Trois mois plus tard, la moitié de mon visage était attaqué par un microbe. Ensuite, je lui ai donné un poumon en mauvais état, et il manque de mourir Dans cette salle de tortures. Trois mois plus tard, mon poumon me lâche, et je suis à deux doigts de mourir, dans une chambre d’hôpital. Et je me dis : « Ça devient un peu bizarre, c’est comme le vaudou ». Alors, je décide de lui donner du bon temps, et qu’il puisse coucher avec Ragged Robin, parce que j’aurais voulu rencontrer une fille comme Ragged Robin. Trois mois plus tard, Ragged Robin vient, une fille déguisée comme elle, et nous sortons ensemble (rire). Et maintenant, chaque fois que je pense à une fille avec laquelle je veux sortir, je la mets dans ma B.D., et trois mois plus tard, je rencontre la fille, et ça arrive tout le temps. Je ne peux pas expliquer ça, mais...
HEROES : Ça explique pourquoi les scénaristes et auteurs de B.D. ont toujours les plus jolies petites amies.
Grant MORRISON : Ça doit être ça (rire). Vous n’avez qu’à l’écrire, et ça arrive. Oui, on peut dire que THE INVISIBLES a été étrange. J’ai rencontré un tas de gens intéressants, dont des personnages que j’avais inventés, comme Lord Fanny, le chaman assassin travesti, j’ai reçu une lettre un jour d’un véritable travesti assassin. Et ces gens sont réels. Des personnages de la B.D. commencent à m’envoyer du courrier !
HEROES : Je sais que vous êtes un musicien, mais je ne connais pas le groupe dans lequel vous étiez, les Fauves. Quel genre de musique jouiez-vous ?
Grant MORRISON : Dans les années 80, il y avait deux groupes que nous aimions, les Beatles et les Sex Pistols. Alors on était comme des Beatles punk, pour ainsi dire. Et si nous étions venus dix ans plus tard, on aurait été comme Oasis (rire). Mais on était meilleur qu’eux (rire).
HEROES : Je sais que vous dessinez aussi un peu. Quel est le dessin de convention le plus étrange que les gens vous aient demandé de faire ?
Grant MORRISON : Darkseid embrassant Superman (rires). Et je l’ai fait (rire).
HEROES : Et quels sont vos futurs projets, après la fin de JLA et des INVISIBLES ?
Grant MORRISON : Je vais simplement prendre quelques vacances, et réfléchir. Je voudrais pouvoir trouver de nouvelles idées sur les super-héros. Donc, je vais m’arrêter pour six mois, et voyager et essayer de trouver de nouvelles idées. Puis je reviendrais l’année prochaine avec un grand projet. J’ai des choses très importantes en attente, et en développement.
HEROES : Dernière question : vos impressions sur l’état de l’industrie des comics, aux U.S.A. et en Grande-Bretagne ?
Grant MORRISON : Je pense que les comics eux-mêmes sont meilleurs qu’ils ne l’ont été depuis très très longtemps. Il y a plus de bons artistes, plus de bons scénaristes, plus de bonnes choses, mais le marché a un problème. Nous avons besoin de repenser ce que sont les comics, comment les vendre et à qui les vendre, et où les vendre. Je pense que créativement, ils sont en grande forme, mais en mauvais état financièrement. Mais je pense qu’il y aura un autre boom. D’ici quelques années, il y aura une autre explosion.
HEROES : je crois qu’on peut en voir les signes ici. Ce festival est le meilleur depuis quelques années.
Grant MORRISON : Oui, et il y a des films de super-héros qui vont sortir l’année prochaine, alors l’intérêt revient. Mais c’est à nous de saisir l’opportunité, et d’essayer de bien vendre les comics, et de les proposer aux enfants, et aux adultes, et à tout le monde.
HEROES : Et bien, merci beaucoup pour cette interview, Grant.
Interview réalisée et traduite par Gérard Morvan.
(1) Voir DIRECT IMPORTATION n° 29, disponible pour 10 francs sur simple demande à notre adresse électronique.
(2) Danny LaRue, le plus célèbre travesti britannique, et modèle de Danny the Street, une rue intelligente, et travesti lui-même !
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